Antoine de Jomini était stratège et écrivain Suisse qui a décortiqué les campagnes de Napoléon et de beaucoup d'autres Grands.
Je vous incite donc à lire ces quelques lignes:
Avant d'aller plus loin, il est important de préciser que les
tactiques ne survivent pas aux changements d'époque ; seules la
stratégie et la base des opérations restent les mêmes.
Les principes énoncés par Jomini sont tirés de l'observation de multiples campagnes militaires, tant d'Alexandre le Grand, que de César, Frédéric le Grand, Bonaparte et celles de la Grande Armée :
Dans un premier temps :
- précisément localiser les fronts droit, centre et gauche de l'ennemi ;
- comparer les forces réciproques entre ces fronts et les siens propres ;
- attaquer énergiquement sur celui qui vous semble le plus faible.
Ensuite :
- poursuivre l'ennemi avec énergie ;
- en montagne, couvrir le front avec de petits détachements, pour
repérer l'ennemi, avant de l'attaquer avec le gros de ses troupes,
avant qu'il ne soit rassemblé.
- toujours manœuvrer de manière à couper l'ennemi de ses bases.
Certains principes ont été repris dans la théorie de la guerre de blindés en général, alors que Carl von Clausewitz disparaissait peu à peu des pensées :
- prendre l'initiative des mouvements ;
- attaquer le point le plus faible ;
- combiner force et mobilité dans l'offensive ;
- disperser l'ennemi par de fausses attaques ;
- des trois alternatives, défensive, offensive, ou une combinaison des deux, choisir soit la deuxième soit la troisième ;
- si la supériorité d'une armée face à une autre est vraiment forte,
elle aura tout intérêt à ne pas concentrer ses forces, mais à attaquer
en deux points, comme les deux ailes.
En fait, d'autres principes extrêmements importants de Jomini ne
peuvent pas être simplifiés en une ligne. Mais on peut rajouter :
- Ne jamais conduire une offensive par le littoral, sauf si le ravitaillement provient de la mer.
D'autre part, une des grandes idées de Jomini est la différenciation
des théâtres d'opération avec les zones et les lignes d'opération et
des lignes de communication et de ravitaillement. La simple
compréhension de ces différenciations fait déjà beaucoup pour
comprendre les idées opérationnelles générales de Jomini.
Les idées de Clausewitz furent jugées plus profondes à la fin du
XIXe siècle, en raison notamment de leur approche apparemment plus
philosophique et globale de la guerre et surtout de l'influence de
l'école germano-prussienne de stratégie. Elles commencent au contraire
à marquer leur âge. Les guerres d ‘extermination, très couteuses en
vies humaines, ont marqué la première moitié du XXe siècle. Celles de
la fin du siècle ont été remportées en appliquant des principes
stratégiques plus efficaces exprimés clairement par Jomini : «
Porter,
par des combinaisons stratégiques, le gros des forces d’une armée,
successivement sur les points décisifs d’un théâtre de guerre, et
autant que possible sur les communications de l’ennemi sans
compromettre les siennes ».
L’approche stratégique américaine, est avant tout d'essence
jominienne. Il n’est pas dans la philosophie du peuple américain de
laisser une trop large place au hasard. Les "
frictions" des
Clausewitz ne sont pas pour séduire leur esprit pragmatique En mettant
en œuvre des moyens logistiques, et en limitant au maximum la part des
impondérables, ils ont remporté des victoires sur presque tous leurs
théâtres d’opération, y compris celui du Golfe Persique, et plus
récemment en Afghanistan et en Irak. De ce point de vue, Jomini est
plus américain qu’européen !
Jomini, personnage d'exception, dont l'extraordinaire clairvoyance,
a permis de décrypter les mécanismes complexes de l’art de la guerre,
et de réaliser l’exégèse des victoires des plus remarquables stratèges
de tous les temps, Frédéric II et Napoléon Bonaparte. Son influence,
niée par les uns, exagérée peut-être par les autres, continue de
susciter l’intérêt et la passion et d’imprimer sa marque sur la pensée
stratégique.